FEMME ASSISE

LAGUNILLAS - CHINESCO NAYARIT- Mexique

100 AV. J.-C. - 250 AP. J.-C.

  • Hauteur : 17 cm
  • Largeur : 14.3 cm
  • Epaisseur : 9.2 cm

Terre cuite creuse beige, à engobe rouge brique et beige clair

Cette femme voluptueuse à l’expression douce et intériorisée, est un magnifique exemple de la sensibilité et de l’inventivit,é de la céramique du Mexique occidental. Superbement polie et rehaussée d’une belle peinture rouge brique, elle appartient à la tradition Chinesco, qui constitue un style à part et particulièrement délicat au sein du répertoire artistique du Nayarit. 
 
Dans cette vaste région du nord-ouest mexicain, on compte presque autant d’expressions que de communautés. Les statuettes Chinesco proviennent du sud du Nayarit et sont aussi connues sous l’appellation Lagunillas ou Compostella, deux sites de provenance importants. Quant au nom « Chinesco », il tient à l’analogie stylistique avec l’art oriental, bien que les statuettes en question n’aient rien à voir de près ou de loin avec l’Asie.
 
La pièce présentée ici figure une jeune femme stylisée, très épurée, assise sur le sol, les jambes écartées. Sa tête de forme triangulaire est représentative du style Chinesco, avec un sommet large, arrondi aux angles, un crâne au profil très étroit avec un revers presque plat et un grand front fuyant parfaitement lisse, reflet, probablement exagéré, des déformations crâniennes qui avaient cours au sein des classes dominantes partout en Mésoamérique.
 
Son visage impassible, sans réelle individualité, s’amincit fortement à mesure que l’on se rapproche du menton en pointe. Les yeux et la bouche se résument à de petites incisions, effectuées avec une pointe dans l’argile encore crue, un traitement qui donne le sentiment qu’elle porte un masque.
 
Les oreilles saillantes sont petites et rondes. Le nez en revanche est fort et cache en partie l’orifice de la bouche. Il arbore une nariguera, signe d’appartenance à l’élite, de même que les trois bandes parallèles traversant énergiquement le côté gauche du visage et le tour du cou rehaussé d’un cercle. Ces motifs peints figurent des tatouages ou des bijoux, qui constituaient des marqueurs sociaux et identitaires forts pour les peuples préhispaniques, lesquelles usaient des décorations corporelles dans un but esthétique mais aussi symbolique.
 
Les bras, abstraits et filiformes, embrassent le torse et viennent poser les mains - que l’on devine seulement - sur l’aine. Les jambes épaisses, en forme de bulbe, sont typiques chez les Chinescos. Elles sont ici recouvertes d’un rouge vibrant qui fait écho aux bandes faciales. L’ampleur du fessier, la forme atypique des cuisses ainsi que l’absence de poitrine n’enlève rien à la finesse et la sensualité de cette femme. Au contraire, ces formes généreuses et rondes la rendent intensément maternelle et nourricière.
 
Partant de l’idée que les céramiques du Mexique occidental représenteraient les rites de passage qui ponctuent l’existence, il est possible que cette femme marque une étape de la vie d’une importante femme du clan, celui du passage à l’âge adulte et à la procréation. La position dans laquelle elle se trouve serait d’ailleurs la position traditionnelle de l’accouchement. 
 
Plus généralement, on pense que les statuettes Chinesco jouaient un rôle lors des rites de fécondité et de fertilité, exaltant l’importance des femmes dans tout ce qui touche à la nature et à la vie, et qu’elles étaient ensuite enterrées comme offrandes à la terre, dans les profondes tombes à puits de la région, auprès des dignitaires censés continuer d’intercéder auprès des esprits et des dieux pour le bien des vivants.