PERSONNAGE DEBOUT
MEZCALA - MEXIQUE
350 - 100 AV JC
Hauteur : 28,8 cm - Largeur : 5,7 cm - Epaisseur : 5 cm
Skarn à diopsides vert-beige tacheté
Cet intriguant personnage est une très belle expression de la culture Mezcala, présente dans la région du Guerrero à la fin de la période préclassique, à qui l’on doit une production de figures de pierre profondément originale. Il se distingue par sa grande taille, son profil filiforme, le caractère de sa pierre tachetée, et l’expressivité du visage obtenue en quelques traits synthétiques habilement distribués.
Les sculptures de style Mezcala ont fasciné les artistes occidentaux du XXe siècle, les surréalistes entre autres, inspirés par les formes inédites, le graphisme épuré et la force intrinsèque de ces créations, drapés dans leur nudité, semblant tout droit sorties des méandres de l’âme humaine.
Si comme le dit Octavio Paz, « la fonction de l’art est de nous ouvrir les portes qui donnent de l’autre côté de la réalité », le répertoire du Guerrero est assurément une réussite. Sa sobriété était peut-être dictée par les outils rudimentaires dont disposaient les artistes de l’époque, toutefois il semble que ces derniers tenaient à ce dépouillement, précisément parce qu’il contribue à stimuler l’imagination et nous pousse à nous interroger sur ce qui se trouve au-delà du visible.
La fonction des œuvres Mezcala, et de sa voisine la tradition Chontal, reste un mystère. On suppose toutefois d’après le fait qu’elles ont été ensevelies sous des habitations ou dans des caches votives qu’elles constituaient des offrandes à vocation rituelle et funéraire dont le rôle était d’honorer les ancêtres et de communier avec les esprits tutélaires de la Terre et de la Nature. Elles sont donc le signe d’une société déjà évoluée sur le plan spirituel, persuadée de l’existence de puissances supérieures.
Le personnage ici présent affiche une physionomie singulière. La tête étroite, très allongée et prognathe appelle immédiatement le regard. Une forte tension s’infiltre à travers les entailles quadrillant la pierre. Le sommet de la tête étroit évoque une déformation rituelle, pratique ancienne et courante en Mésoamérique au sein des classes dominantes.
Les arcades sourcilières arquées se rejoignent à la racine du nez. De ce point central, partent en oblique deux longs sillons. Ils figurent les plis sinusoïdaux et délimitent en même temps le nez qui affecte la forme d’un large triangle, sans arête, au beau milieu du visage. Les yeux sont suggérés par deux dépressions superficielles. Habillées par l’ombre des arcades, elles donnent naissance à un regard, sinon sévère, tout du moins très concentré et déterminé. L’ouverture de la bouche est signifiée par une discrète encoche horizontale. Les lèvres apparaissent particulièrement charnues sous l’effet des belles gravures courbes que l’on observe de part et d’autre. Les nombreuses gravures de ce visage, dont les volumes restent néanmoins assez plats, lui confèrent un air tout à fait particulier.
Le corps sans bras est haut et tubulaire. Les avant-bras sont positionnés sur l’abdomen et représentés par de simples entailles courbes. Bien que schématique, le mouvement dynamique de ces gravures anime ce personnage et font écho aux lignes de forces du visage. Des redans sous les coudes et en bas du ventre font ressortir le volume du torse et le dessin des hanches. Les deux jambes se séparent à mi-chemin de part et d’autre d’une encoche profonde, arrondie à son extrémité. Un relief dans la partie inférieure semble situer la limite des chevilles et annonce les pieds qui n’ont pas été sculptés.
A noter : présence de deux trous d’attache à l’arrière de la tête, au niveau du cou, servant probablement à fixer cette œuvre sur un support.